MOI, MOI, MOI !
Conditionnements, opinions et musculation.
Pour commencer, parlons de génétique. Les humains ont 99% de gènes en commun avec le chimpanzé et, par exemple, 90% avec la souris. Tous les êtres humains partagent le même patrimoine génétique à 99,8%.
Ce patrimoine est mis en forme par l'environnement. Autrement dit, C'est le contexte qui va nous construire à partir de cette grande proximité de base.
Quel est ce contexte?
On peut y répondre à l'aide d'une autre question et des développements qu'elle implique.
Sommes-nous libres de la période historique et de l'endroit où nous naissons?
Non.
Nous sommes entièrement déterminés par le contexte historique et social.
Notre conception même est le résultat des a priori, valeurs, jugements de valeurs, moyens, d'une époque et d'une société.
Ce qui signifie que, malgré des différences superficielles (mais semblant primordiales pour nous), nous sommes tous très semblables.
Quand nous naissons, nous sommes avant tout un système nerveux qui va être rempli par le système social. Il y a très peu d'automatismes innés en nous. L'essentiel des automatismes est acquis. Autrement dit, un enfant qui naît, étant incapable de se débrouiller seul et presque entièrement vide (en termes de mémoire, savoir-faire, intelligence), va devoir être rempli... par l'éducation.
La mise en forme est sociale. Un enfant laissé seul dans la nature ne peut que mourir. On va l'éduquer. On remplit donc son système nerveux.
Ainsi, ce qu'est chaque individu, c'est... les autres.
C'est-à-dire que nous incorporons en nous nos proches (leurs règles, leurs comportements, valeurs) et les valeurs sociales (à l'école, au travail, avec la tv, etc.). En n'oubliant pas que nos proches eux-mêmes ont été formatés auparavant par le contexte social...
Sans devenir les autres, nous n'existerions pas. Sans leurs règles, leurs valeurs, leurs solutions, nous ne pourrions exister. Nous sommes ce que nous apprenons. Et ce que nous apprenons, ce sont les autres (ce qu'ils ont fait, ce qu'ils font, ce qu'ils disent, ce qu'ils pensent). Pensez à ce jeune enfant perdu dans la jungle et vous comprendrez aisément que cet enfant ne peut survivre car il n'a pas incorporé en lui de quoi composer avec l'environnement.
Tout notre savoir (savoir-être, savoir-vivre, savoir-faire) nous vient des autres.
Ce qui signifie que l'idéologie sociale en vigueur à une époque formate les esprits. Nous sommes construits dès notre naissance (et même bien avant) par cette idéologie sociale, nous en sommes imprégnés, nous pensons à travers elle.
Un patrimoine génétique commun à 99,8%.
Un système nerveux identique, conçu pour fonctionner selon des schémas innés. Avec donc des besoins primaires semblables.
Un système nerveux mis en forme dans une époque donnée, par une société donnée. Ce qui signifie des automatismes acquis quasi-semblables (la mémoire permettant la conscience et notamment la conscience de soi, donc notre sentiment d'être et d'être différent, est remplie par les autres).
Cela laisse peu de place pour de grandes différences.
Certains vont rétorquer qu'ils mangent paléo ou qu'ils sont frugivores, ce qui est quand même un signe de différence prononcée. A ceci je rétorquerais qu'il est plus facile de changer sa manière de manger que sa manière de penser.
Dans une société ultra-individualiste, dont le coeur battant est la
production et la consommation, on se singularise par la... consommation.
En cela, on ne fait que répondre à nos conditionnements.
Encore une fois, manger paléo ou frugivore, ou des pizzas, ne nous distingue que par la surface, puisque nous obéissons à l'ordre plus fondamental (et très commun) de nous distinguer par la consommation.
Puisqu'au niveau de l'hypothalamus et du système limbique, nous portons les mêmes déterminismes (conditionnements), c'est au niveau de la zone orbito-frontale que la différence réelle va pouvoir se faire. Et notamment par l'imagination créatrice. C'est en prenant du recul par rapport à nos conditionnements (à l'ensemble de nos conditionnements) que nous allons pouvoir construire notre singularité, donc notre « vraie» différence.
Prendre du recul sur nos conditionnements, cela signifie prendre du recul sur «la culture qui nous a formaté » à l'aide de « la culture qui permet d'imaginer d'autres voies » (d'autres manière de penser et d'agir).
Comme je l'ai écrit dans « Stratégie de la motivation », on sort de la culture par la culture.
« Evoluer, c’est sortir de la culture grâce à la culture.
Le terme culture comporte deux acceptions:
- La première est la panoplie de tous les éléments constitutifs d'une
société : traditions, manières de parler, de se vêtir, de se comporter,
d'entrer en relation … c'est l'ambiance générale dans laquelle baigne
tout nouveau venu dans un monde.
- La seconde est constituée d'une réflexion sur la première. Il s’agit de
prendre du recul, d'exercer son esprit critique, de mettre en doute le
monde que l'on voit. Ce monde ne va pas de soi, il est «relatif ». En se
« cultivant », on gagne de l'autonomie, on devient capable de rejeter
les fausses évidences, les croyances erronées. On comprend pourquoi et
comment chaque vie, chaque regard sur le monde peut et doit être
singulier. La culture, en ce sens, est la création d ’un être singulier.»
Autrement dit, on ne peut réellement être différent sans se cultiver.
Tout ce qu'on fera sans culture, ce sera des variations superficielles sur une même base de conditionnements (biologiques et sociaux). Moins l'individu a appris à penser et à se penser lui-même, plus cette "base" sera ce qui le constituera essentiellement. Il sera avant tout cette base. Il sera... basique.
Pour changer un système, il nous faut du recul (afin de mieux l'observer).
Chacun de nous est un système. Nous avons donc besoin de recul pour être vraiment différent. Seule la culture l'apporte, car elle permet de mieux penser, de créer de nouvelles connexions, d'imaginer d'autres possibilités et de concevoir un nouveau soi, davantage libéré des conditionnements biologiques et sociaux.
Dans une société No Pain No Gain, toute activité No Pain No Gain est le fruit du conditionnement de base. Et être plus No Pain No Gain que la moyenne, ce n'est pas être différent sur le fond, on l'aura compris.
Plus on agit de manière automatique, moins on réfléchit, alors plus on
répond selon des mécanismes inscrits en nous et qui nous commandent à notre insu.
Plus on affine notre réflexion, plus on apprend, plus on peut espérer se libérer et faire de soi un être singulier et non juste le produit de
l'idéologie dominante.
En bref, nous avons tous le potentiel pour être vraiment différents, mais très peu d'entre nous exploitent ce potentiel. Les autres agissent tels des robots (des machines triviales organiques) programmés par
l'idéologie sociale dominante.
Comprendre cela, c'est déjà faire une partie du chemin.
Source : Groupe facebook Méthode Lafay